Mon arrière grand-père Alphonse, davantage mécanicien que boiseux, a réalisé le bureau incliné de sa première fille Marie Anne ainsi que des coffrets de couture à ses heures perdues. Il était accompagné par son frère André, menuisier. Ma grand mère naquit en 1929, suivi par sa soeur puis son frère. Mais une triste période de 1944 lui fera perdre son père, puis Augustine, sa mère quelques temps après... Durant cette période, un homme, René, sera placé chez eux pour accompagner les travaux du quotidien, tout en permettant à chacun de suivre une scolarité, ou particulièrement l'école buissonière pour le dernier ! Ma grand mère quand à elle maitrise le français aussi bien que l'allemand, en "platdeutsch" ou en écriture gothique. Elle suivra même de l'anglais dans le cadre de ses études, avec un avenir encouragé...et pour lequel il fallait marcher le matin et le soir à travers le chemin champêtre pour se rendre à l'école de Morhange.
René, charcutier de métier avant la guerre et aussi ingénieux qu'autodidacte, ne manquera pas de séduire ma grand mère. Ils restèrent au village, puis René fut alors employé dans une entreprise du BTP et finira comme cadre ! Ils quittèrent tous deux la ferme famillialle pour construire une grande partie de leur maison. Mais mon grand père, sans être du métier allait également fabriquer du mobilier et une petite cave à cigare modeste. C'était le temps des petits cigarillos, accompagnés d'une petite eau de vie après les repas, le schnaps à la mirabelle ! Le moment ou l'on rigolait des pieds de tabac cachés durant la guerre, entre les rangs d'haricots, et que l'on parfumait avec des prunes sèches...De nombreuses années plus tard, mon pére est né, avec un potentiel davantage intélectuel que manuel ! Mon grand père ne survecu pas à un accident.
Ma grand mère, devient face à la discrétion de mes parents sur cette histoire de famille, une figure pour rompre le silence et mieux comprendre le monde qui m'entoure. Un dialogue s'installe, à travers lequel les questions ont autant d'importance que les réponses. Lors de mes séjours agréablement passés dans sa maison, il m'est conté l'histoire de ma famille. Enfant j'y passais le dimanche, mais ce que j'ai le plus apprécié, c'est la période estivale, plus longue. L'hiver était rythmé par le froid et la neige suivi par des soirées courtes mais riches, alors que l'été c'était sous le soleil dans la nature. Un séjour plus riche encore. La matinée se déroule autour des devoirs, après des tartines à la confiture maison, ou bien des gateaux marbrés, kougloff... l'après midi au jardin, sous les fruitiers, dans l'écurie, et les jours de pluie à l'atelier du sous sol ...c'était le temps des mirabelles, des cerises, et du sirop à la grenadine, sans oublier les croissants au chocolat avec du sucre glace dessus. Les soirs d'été, nous discutons dehors avec ma grand mère, sous les étoiles jusqu'à l'heure du marchand de sable, la sensibilité du monde opérait ...
A la maison chez mes parents je n'aurai de cesse de me découvrir aussi. Je n'ai pas eu de modèle précis, mais des valeurs à respecter. Libre, je peux dire que j'étais libre de me chercher tout en ayant un cadre d'affection silencieux. Mes journées sont rythmées par le questionnement : pourquoi le père noël du matin n'a pas les mêmes chaussures que celui de l'après midi était plus important que de savoir si oui ou non il existait vraiment. De ces questions va naitre une irrésistible envie de savoir en alternance avec les cabanes dans les bois du ruisseau, etc... Ma mère l'intransigeante m'apporte le rythme battant de la vie, et mon père plus calme, l'esprit littéraire. Il évoquera ses rêves et renoue avec le législatif tout en partageant sa poésie, les lectures du soir, les lectures du dimanche matin aussi en été ...
Cette histoire me marque fortement. Je suis enraciné à des valeurs : celles de la terre, de l'humain, de l'authenticité...
C'est alors que je lis des pages d'expériences à réaliser, je démonte et remonte des machines, j'aborde l'électronique, l'électricité puis enfin je m'ouvre à l'art graphique et à l univers du bois. A l'école mes résultats sont corrects sans un réél grand investissement. Nous pouvons lire sur les bulletins de l'école Van Gogh " Pierre cherche midi à quatorze heure" ! Autrement dit j'étais un drôle de zèbre .... mais restons discret.
Le piano puis la clarinette auront été aussi des possibilités d'émancipation.
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" Tous les enseignants m'ont marqué, mais une chose est inscrit en moi, car une fois par semaine au moins, durant une classe, nous devions frapper sur la table avec la main en disant " j'y arriverai " tous ensemble. Cette institutrice de CP aux méthodes traditionnelles, qui plus est directrice n'aura pas laissé de séquelles, quoi que..."
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Fondu dans la masse depuis de nombreuses années, discret, je quitte cette carapace pour petit à petit devenir qui je suis. Ma curiosité est une démarche d'apprentissage autodidacte. Mon caractère s'affirme et je commence à travailler à partir de 15 ans durant l'été (saisons de récolte du tabac au nord de Strasbourg, puis saisons de laboure chez un agriclulteur à proximité de chez mes parents). Entre temps, l'ébénisterie me captive peu à peu et les systèmes d'ouverture à secrets me fascinent…
Je termine alors mes deux dernières années au collège Paul Verlaine, au sein d'une classe Européenne, à proximité de Metz. Ca sera une belle rencontre avec des professeurs marquant, notamment en français avec une approche de la phylosophie et en allemand avec l'autauritarisme et le positif communicatif. je prends la direction des Vosges, pour commencer un apprentissage en ébénisterie ; Je ne peux vraiment exprimer le pourquoi de cette décision. J'intègre le lycée du Haut de Bellieu à Neufchâteau. Ma seconde et ma première professionnelle m'apportent les bases de ce métier grâce à un professeur d'atelier extraordinnaire. Les résultats scolaires sont bons, quand à l'atelier, j'aurai pu y dormir si je n'avais l'obligation de me rendre à l'internat tous les soirs de semaine. C'était le début du voyage pour moi, de croiser mon père au détour d'une gare.... Puis arrivera le point de confrontation, le besoin de tout quitter.
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"Depuis tout petit déjà, je cherchais de petits endroits pour dissimuler des objets, des cachettes qui existent toujours en tant que telles. En grandissant, ces cachettes devenaient ingénieuses et je commençais à fabriquer des emballages pour protéger le contenu. Je détournais alors des horloges ou des cadres pour y ajouter un double fond et cacher ainsi mes trésors. La limitte fut posée par mes parents lors de la découpe du sol de ma chambre ! Pendant mes études d’ébénisterie je continuais à développer ma recherche dans l'univers des coffrets que je commençais à fabriquer de toute pièce. "
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La fondation de Coubertin et les ateliers Saint Jacques / la fameuse caisse à outils "Arlequin" / Pierre MARCHAL
Soucieux de parfaire ma connaissance pour grandir grâce et avec le métier, mais surtout pour quitter le lycée, j'entreprends un Tour de France.
Le compagnonnage m'a séduit pour le goût de l'aventure. Durant plus de sept ans, je parcours la France et l'étranger. Je peux citer entre autre Lyon, Rennes, Bordeaux, Le puy en Velay, St Etienne, Nimes, Paris, un passage à la Fondation de Coubertin en tant que Boursier, la Finlande, le Gabon, la Bulgarie etc...
Mon Tour de France, riche de rencontres humaines, me permet d'accéder à un niveau de Maîtrise en ébénisterie, mais surtout à savoir qui je suis. Comment expliquer ce voyage qui vous permet de devenir qui vous êtes en douceur, avec comme trait d'union, votre métier, la matière, l'esprit et vos mains. Alors me voilà propulser au Puy en Velay et St Etienne pour réaliser le travail de réception de compagnon, un travail au gout parfois amer, mais dont certaines personnes vous réchauffent le coeur. Je cite " Pierre, les larmes sont le langage des gens de coeur" . Je suis imprégner en profondeur de tout cet univers, l'histoire, le symbole... Toutes ces années à voyager, partir à la rencontre des autres : On part pour un métier pour comprendre que la matière nous transforme, comme quelques marches sur plusieurs jours pour penser et réfléchir, pour philosopher à travers les rencontres aussi boulversantes que burlesques ...
Dessin à main levée format A1 / Modelage sur terre puis moulage / Travail de réception "de la réflexion intérieure à l'écriture"
Je cloture alors ce long parcours de patience, et l'on me propose d'etre formateur en CFA durant quatre belles années tout en étant rédacteur pour une encyclopédie sur la dernière année. Je redige le contenu des cours tout en mettant en place une pédagogie. Tous ces apprentis en devenir, encore nommés des "lapins" dans le compagnonnage, m'ont permi de peaufiner ma personalité. Quand au sujet encyclopédique, il traite de l'évolution du mobilier par rapport à l'environnement social. Seront abordés la vie politique, l'évolution des moeurs, des besoins, les techniques ...
A cheval sur plusieurs lieux à la fois je quitte petit à petit cet univers pour me poser quelque part. C'est ainsi que je me retrouve face à mon rêve après avoir offert mes compétences techniques auprès d'ateliers, architectes et designers ! Suite aux dernières expériences professionnelles, je souhaite revenir à une passion de mon enfance, le coffret. Mon père me quittera en me laissant comme témoignage, "n'ai pas peur de faire ce que tu as envie". Cette phrase parmi nos derniers échanges marquera le début de plusieurs décisions qui ne font qu'une en réalité. D'aucun diront, il s'agit bien sûr de la crise de la trentaine ...
M'appuyant sur une recherche portant sur le coffret, réalisée en 2005 à la fondation de Coubertin, je souhaite apporter toute cette culture de métier sur ces objets magnifiques. Réalisant quelques écrins en parrallèle de mon cheminement, je souhaite légitimer cela en réaffirmant le métier de coffretier. La marque TERCECRET voit le jour en 2013. Le nom s'articule entre les sémantiques des mots, tercer, taire, secret, créer...
De cette aventure vont naitre des rencontres humaines, et des créations qui dépassent parfois le simple cadre du coffret. Je continue ainsi ce cheminement avec un fil conducteur qui continue à me surprendre. La quête de soi est un engagement à se connaitre.
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J'aime partager tous ces souvenirs auprès de jeunes, ou de rencontres, la passion est communicante. Il est important pour moi de livrer les annecdotes et mon expérience en général. J'ai rencontré de nombreuses personnes, vécu tellement d'aventures, dans les moments parfois douloureux ou drôle, que les partager c'est offrir un regard positif sur la confiance en soi.
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Maison TERCECRET en quelques dates et chiffres
PRIX ET DISTINCTIONS
2014 - Inscription au registre des métiers d'art
2015 - Prix du travail manuel – Rotary club de Bordeaux
2016 - 1er Prix des métiers d'art – Rotary club de Bordeaux
2016 – Nominé au talent du luxe – le centre du luxe Paris